Les Encagés - CR 26
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Et les CR de la 5ème session, jouée en Janvier, online puisqu'on avait un covidé. On a du jouer 3-4 heures. Il y a une accélération des preuves que je leur donne, que je n'avais pas forcément prévu, j'aimais bien le rythme lent et la pression à attendre les éléments d'enquête, mais je me rends compte qu'à ma table (donc ça peut être différent ailleurs), ils veulent voir un rythme soutenu. Donc j'accelère un peu, même si du coup, ils finissent par moins creuser certains trucs... Mais bon, tout le monde s'amuse, c'est ça le principal
- Débriefing sur l’emploi du temps de Bazas, la femme qui vient poster les lettres, rapport d’autopsie entre Lombardi et Laplace confié à Huard (CR Tellier)
Mercredi soir. On se pose avec l’équipe autour d’une tasse de café, le temps de se remettre un peu les idées en place au milieu de tout ce foutoir d’informations disparates, et tasser les émotions à vif.
Les bandes vidéo sont arrivées entre-temps et nous ont permis d’identifier aux deux endroits une femme à l’accoutrement assez caractéristique : grosses lunettes de soleil, grand chapeau occultant le visage, écharpe, imperméable… L’accoutrement parfait du détective de pacotille, ou de quiconque souhaite passer incognito sous le radar des caméras.
Les informations recueillies sont évidemment denses mais ne nous fournissent qu’une seule et unique piste tangible : retrouver Mme Lombardi. Le reste, pour le moment, n’est qu’une nébuleuse d’anonymes.
Brochard élabore une théorie selon laquelle une société secrète de « guetteurs » aurait émergé de ces vieux événements, qui se serait réactivée par suite de la disparition de Melissa Laplace. On se croirait dans un polar de quai de gare, mais à ce stade de l’enquête, je ne ferme plus la porte à aucun scénario, même le plus improbable.
Le plus important à ce stade, c’est d’entériner le lien entre toutes ces affaires, le pont qui enjambe ces 20 ans. Huard, toujours zélée, se propose de demander le rapport d’autopsie de Laplace pour comparer avec celui de Lombardi.
Le portrait-robot de Némo est également tombé. En espérant que cela nous aide à remonter plus rapidement la piste de notre délateur anonyme. Avec ça et les retours potentiels des PC mis sous scellés, on va avoir de quoi réalimenter un peu la machine…
Demain. Pour l’heure, tout le monde a grandement besoin de repos. Enfin tout le monde : pas Huard, qui doit se coltiner la paperasse des rapports d’autopsie.
Je rentre tenter d’arrondir les angles avec Marie. Brochard aussi semble prendre l’option d’une soirée casanière. En voyant Josse filer à l’anglaise, je me doute qu’elle va plus probablement aller noyer tout ça dans quelques verres de cognac. Chacun sa manière de décompenser…
- Découverte d’un ‘copycat’, Laplace a été tué de manière plus rapide. (CR Josse)
Une enquête pareille, ça nourrit les espoirs d’une possible promotion mais ça épuise le cerveau. Avec les années j’ai appris à détecter le moment où j’ai besoin d’un break avant de péter un plomb. Je quitte donc la caserne pour retourner à mon appart et me changer avec une tenue appropriée. Bon évidemment je vais pas me déguiser en cagole, faut pas pousser mais bon je me sape un minimum pour pouvoir plaire. Tout en me préparant et en galérant pour me maquiller, je m’interroge sur le pourquoi je fais ça en fait : l’expérience m’a montré que le minimum est vraiment pas très élevé pour les mecs que je croise !
Bref, sur ces réflexions philosophiques de comptoir, je prends mes clés et part pour le Blue Lagoon, un club que j’apprécie. Je passe une bonne soirée et finit par rentrer avec un mec pas trop mal. Il est plutôt dans le haut du panier de d’habitude car au réveil il me propose de prendre le petit-dej avec lui avant de partir bosser. C’est mignon, je lui dit que j’ai pas le temps car je dois prendre mon service tôt, sans lui avoir précisé ce que je faisais comme travail, ça génère trop de question et ça pourrait poser des problèmes s’il venait à me recontacter pour lui faire sauter un PV ou une connerie du genre.
Je rentre chez moi pour prendre une douche et je repars au taff, fatiguée mais avec l’esprit aéré, prêt pour une nouvelle journée de saisie de pc !
(CR de Huard PNJ - écrit par le joueur de Josse)
Il est 1h du mat’ et je me demande pourquoi j’ai accepté de me taper les rapports d’autopsies de LOMBARDI et LAPLACE. Enfin si je sais, pour rabattre le caquet de BROCHARD et JOSSE qui se foutent bien de ma gueule dès que j’ouvre la bouche pour faire une analyse. Ca me rend dingue, et je vois bien que TELLIER n’en pense pas moins, même s’il tente de garder une attitude neutre en tant que chef d’équipe.
Je savais que mon stage au FBI sur le profiling ferait jaser, déjà que cette spécialisation est vue par le policier/gendarme de base ou certains officiers comme de l’esbrouffe, mais là ce vieux con de BROCHARD ne se donne même pas la peine de cacher son mépris pour mon travail. Bon après pour un vieux de la vieille, c’est normal, de toute façon il est dépassé ya qu’à voir quand il tente de rédiger un mail, c’est un dinosaure en voix d’extinction. C’est plus étonnant pour JOSSE qui devrait avoir compris que c’est une spécialité d’avenir, ça va se développer et elle aura pas le choix que d’accepter si elle veut passer capitaine et diriger une équipe. Enfin je dis « si elle veut » mais c’est un secret pour personne, avec ses dents qui rayent le parquet. Je dois conserver mon flegme, après tout je ne suis qu’un PNJ, j’imagine que c’était pareil quand on a découvert l’ADN, il a fallu du temps pour convaincre que c’était une avancée décisive et il devait y avoir un paquet de Brochard et de Josse pour faire chier. Ils feront moins les malins quand ça le profiling sera devenu tellement reconnu qu’il en feront une série TV…
Sur ces réflexions, je retourne à l’étude des dossier d’autopsies car le meilleur moyen de prouver l’utilité de ma spécialité serait de faire une découverte que personne n’aurait vu. Et là Eureka, c’est l’illumination : si un œil novice pourrait conclure qu’il s’agit du même tueur sur les 2 affaires car le modus operandi est le même, je commence à lister des petites différences : la durée de la détention avant de tuer ces pauvres filles, la profondeur des coups reçus, etc Il s’agit d’un « copycat », comme on dit aux states, un autre tueur qui copie la façon de faire du premier !
Reste à comprendre comment et pourquoi le tueur de 2012 a copié celui de 1993, mais je rayonne quand même à l’idée de voir la tête de mes collègues demain matin quand je vais leur annoncer ça !
- Point à la juge d’instruction, email de Nemo « tout part de Sutton et tout reviens à lui », On apprend que Nemo est en fait Dozier en demandant au cyber café. Puis visite à la MJC ou Dozier donne des cours (CR Tellier)
9h du matin. Il est temps de débriefer la Juge, qui, comme à l’accoutumé, se montre aussi attentive que réaliste. De son point de vue, même si les corrélations se précisent, elles restent encore un peu maigres. Elle me met en outre en garde sur la recevabilité des pièces qui s’accumulent au dossier. Ce qui participe de l’enquête ne constituera pas pour autant des éléments probant le jour où cette affaire passera devant un tribunal. Quand on en sera là…
Brochard et Josse se sont entre-temps procuré le contact d’une experte des fugues dans la région de Bordeaux, une certaine Stéphanie Simon. Il n’y a pas de sotte spécialité… Qui sait si elle n’a pas eu entre les mains l’un de nos encagés à l’occasion de ses recherches…
Alors que je m’apprête à les envoyer l’interroger, j’entends le ping caractéristique de ma boîte mail.
C’est évidemment notre bon ami Nemo, régulier comme une horloge. Et toujours aussi lapidaire : « Tout part de Sutton. Tout revient à lui. »
Histoire d’être certains que l’on ne s’égare pas…
Les bonnes habitudes étant prises, j’expédie Josse en express au cybercafé d’où est tracé le mail, munie du portrait-robot. Bingo… Le gérant le reconnait immédiatement, et même mieux que ça : il est capable de nous dire qu’il s’agit d’un « vieux monsieur qui donne des cours à la MJC Saint Sébastien » - qu’il connait par son frère. Un coup de fil plus tard, nous voilà finalement édifiés sur l’identité du fameux Nemo : l’individu répond au nom de Jean-Paul Dozier.
J’appelle illico la juge pour solliciter une perquisition – sans surprise, son accord est immédiat. Le serrurier va nous rejoindre sur place.
Au milieu de tout ce remue-ménage, je réalise que les rapports FISC de Bazas sont arrivés sur mon bureau. Finalement !
Le temps que l’on reçoive toutes les autorisations pour la perquise, je jette un premier coup d’œil au dossier. Qui m’apprend quelques faits plutôt intéressants.
D’abord, que la vente de son vignoble à CVS investment a été largement surévaluée, d’au moins 50%
Ensuite, que c’est un vaste chaos – voulu et organisé – qui règne dans son historique fiscal.
L’actionnaire unique de CVS étant décédé en 93, Baker et Bazas ont eu tout le loisir d’utiliser la compagnie à leurs fins… Autant dire : comme une bien commode société écran leur ayant permis de blanchir tout un tas d’activités plus ou moins frauduleuses.
Je note enfin en bas de la dernière page qu’il a procédé à 6 retraits en liquide entre les mois de décembre et mars dernier. Encore un éclairage plutôt concordant, mais concordant avec quoi exactement ?
- Perquisition du domicile de Dozier. Appartement vidé, trouve son téléphone et son ordinateur, RDV à l’ULS harmonie (CR Brochard)
Le problème des amateurs, c’est qu’ils se font toujours avoir à un moment. Dozier est plutôt un bon amateur. On a mis quelques temps, mais on a fini par le trouver. Envoyer un message d’un cyber ou l’on est connu … Ben c’est de l’amateurisme. Heureusement que dans notre métier nous en rencontrons beaucoup des comme lui. On arrive à les mettre derrière les barreaux.
Nous sommes devant la porte de l’appartement de Dozier, le serrurier commence son office sur la porte de l’appartement. Il est sympa ce serrurier, je l’ai rencontré sur d’autres affaires. Il travaille vite et bien. Son office effectué, il ne pose pas de question, nous souhaite une bonne journée et s’en retourne à sa besogne plus rémunératrice que celle effectuée pour le compte de l’Etat.
Nous pénétrons dans l’appartement et ce qui frappe tout de suite, c’est qu’il a été vidé (note du MJ: c'était plutôt très rangé mais bon...). Comme si l’appartement était prêt à être rendu. Il est vide et pourtant, comme s’ils avaient été laissés à notre intention, nous trouvons un Iphone 5 et un ordinateur.
Josse, forte de sa compétence informatique, se lance dans l’allumage des appareils électroniques. Pour ma part, je regarde dans les meubles et dans les autres pièces. Tellier s’associe à ma fouille méthodique.
Ce qui frappe ce sont les quelques dessins d’enfants que nous trouvons dans l’appartement. Après avoir regardé, ils sont tous signés « Je t’aime parrain, Hélène ».
Il y a aussi beaucoup d’album photos, mes aucun après 1993… L’année du délire de Marc Lombardi. Hélène … Hélène Lombardi. Oui cela devient plus clair. A la fin d’un album, nous nous arrêtons Tellier et moi sur une photo. Dozier, les époux Lombardi, les filles Lombardi et un autre homme … La fin d’une époque et le début de la folie pour Marc.
- Capitaine, capitaine, j’ai réussi, j’ai allumé l’Iphone et l’ordi.
Josse exulte, c’est vrai qu’il parait que l’appareil de la pomme est particulièrement difficile à allumer. Enfin bon, c’est un métier… Moi mon truc c’est l’humain.
- Le dernier rendezvous de Dozier, c’est le 13 mai dans un restaurant, le HA. Et je peux aussi vous dire qu’il se rend régulièrement à l’unité de long séjour « harmonie ». Visiblement il rend visite à quelqu’un.
- Très bien Josse, séparons-nous dit calmement Tellier. Brochard, vous allez au HA pour voir avec qui il avait rendez-vous. Josse vous venez avec moi. Nous allons à l’ULS Harmonie.
Je reste avec ma photo en main, je ne sais quoi penser de cette perquisition …
- Restaurant à Bordeaux HA diner avec le procureur général Geoffroy de la borde beaulieu (CR Brochard)
Me voilà à me balader dans Bordeaux pour me rendre au HA. C’est un beau restaurant, plutôt pour les notables et les notables à Bordeaux, c’est quelque chose. Je gare la voiture non loin, je sors et je remets mes vêtements correctement. Ce n’est pas souvent que j’ai l’occasion d’entrer dans ce genre d’établissement.
Le décor est assez grandiose. L’entrée respire le luxe et le bon gout. Il n’y a quasiment pas de visibilité sur la salle. Les gens qui viennent là sont au calme. Je pourrais peut-être inviter Anais ici un jour …
Bref, je dois me reprendre. Le loufiat à l’accueil me regarde avec un drôle d’air mais il garde son sourire de circonstance.
- Bonjour Monsieur, en quoi puis je vous être utile ? me dit il avec son sourire de vendeur de voiture d’occasion.
Je sors discrètement ma carte, je lui souris
- J’ai quelques questions à vous poser, cet endroit estil tranquille ?
- Pour le moment oui monsieur, répondil sans se départir de son sourire
- Très bien. Connaissez vous M. Dozier ?
- Oui monsieur, c’est un habitué. Il vient ici, disons tous les deux mois environ.
- Et il est venu récemment ?
Il compulse un registre électronique et la réponse est très rapide.
- Oui Monsieur. Il était là il y a peu.
- Etait-il seul ?
D’un coup je le sens se raidir. Evidemment que Dozier n’était pas seul. Le loufiat ne pourra pas dire le contraire. Il est très gêné.
- Vous savez, il n’y a pas de problème particulier. C’est une simple enquête de voisinage … dis je pour le rassurer
- Et bien … M. Dozier était … euh … Avec M. De la Borde Beaulieu.
Là, c’est moi qui accuse le coup … De la Borde Beaulieu ? Qu’est ce que Dozier peut bien faire avec le procureur général ???
- Je vous remercie et bon service
- Merci Monsieur …
Je sors … Je ne sais pas vraiment comment annoncer cette nouvelle à Tellier.
- Visite à l’ULS Harmonie Hervé Torres (CR rédigé par le MJ)
Les pneus de la voiture banalisée crissaient doucement sur le gravier de l’allée boisée qui menait à la maison de soin. Tellier gara le véhicule et en sortit, jetant un coup d’œil aux environs.
- C’est calme et tranquille, marmonna Josse
Arrivés dans l’entrée, aux teintes pastelles et colorées, les deux gendarmes se dirigent vers l’accueil et déclinèrent leurs identités. L’aide-soignante aux traits tirés échappa un mouvement de surprise, rapidement réprimé. Professionnalisme ou ennui, difficile à dire… Enfin, toujours est-il qu’elle appela le directeur de l’établissement pour les recevoir. Celui-ci les fit entrer rapidement dans son bureau. Il avait un début de quarantaine, un costume qui avait vu des jours meilleurs, et plus la tête d’un comptable qui tente d’équilibrer un bilan financier que d’un thérapeute qui se soucie de l’amélioration de l’état de santé des malades qu’il accueillait.
Après avoir fouillé rapidement dans les dossiers, il nous apprend qu’un certain Dozier rend visite effectivement à un malade du nom de Hervé Torres le 15 Mai. Celui-ci a été interné, à sa demande, en 2004. Après quelques semaines d’évaluation au CHU Charles Perrens, il a été transféré à l’Unité de Long Séjour Harmonie. Torres était d’abord très agité, avant de se replier petit à petit sur lui-même, jusqu’à finir en catatonie. Il a soudainement repris ses esprits dans la nuit du 19 au 20 décembre 2012. Il a quelques affaires personnelles, des écrits, mais il nous faudrait obtenir une autorisation du juge pour y avoir accès. Qu’à cela ne tienne, Tellier en demandera une plus tard. Est-ce que ça a un rapport avec notre enquête ? Après tout, on a tous des vies personnelles, et des proches, même si on est un suspect… Il faudra certainement qu’on demande à Huard ou Messali de faire une petite recherche sur le bonhomme.
En sortant, Josse ne peut s’empêcher de voir Tellier frissonner en redressant le col de son manteau pour s’engager sous la fine pluie qui ne cesse de tomber. Peut-être la fatigue, ou alors la réalisation qu’il suffit de pas grand-chose pour se retrouver seul, dans une chambre, dans sa tête, avec pour unique lueur d’espoir le jaune pisseux des murs qui, d’après le gestionnaire de l’ULS, est bon pour le moral des patients. Plutôt crever songea Josse perdue dans ses pensées.
- Reçoit le rapport sur les menottes, Sophie Ianski en a acheté 10 paires ; visite chez Ianski (CR Tellier)
Une nouvelle chemise a atterri sur mon bureau. Le rapport Duteil, j’avoue qu’il m’était pas mal sorti de l’esprit celui-là.
Une piste qui ne m’avait pas l’air bien robuste au départ et qui, après examen, titille un peu ma curiosité : au milieu des « petits » acheteurs, il fait apparaître le nom d’une certaine Sophie Ianski qui s’en serait procuré 10 en une seule transaction. 10, c’est quand même beaucoup, même pour un usage festif. Quoiqu’à la longue, plus grand-chose ne m’étonne…
Je décide de remettre toute décision sur les suites à donner au lendemain. Je n’ai plus les idées assez claires à cette heure.
J’émerge après une courte nuit de sommeil sans rêves, Marie est éveillée mais mutique, je me faufile dans la salle de bain pour une douche et un rasage express. A la radio, ils annoncent que le Conseil Constitutionnel a promulgué le mariage pour tous. Avec un peu de chance, les cathos réacs qui pullulent à Bordeaux vont nous lâcher un peu avec leurs défilés, leurs sittings à la bougie et leurs slogans désuets.
Dès mon arrivée à la GN, je gratifie la Juge de mon coup de fil habituel pour la tenir informée des derniers développements.
Le dossier sur les activités de CVS m’attend sur mon bureau, j’en remets l’examen à plus tard – la priorité du jour, c’est Sophie Ianski. Après avoir décanté ce truc, mon instinct me dit qu’il faut aller voir plus loin. Et mon instinct, s’il ne me parle pas souvent, ne m’a jamais trompé.
Quelques rapides recherches nous apprennent à son sujet : qu’elle a 36 ans, qu’elle est née à Roubaix, qu’elle s’est enrôlée dans l’armée le jour de ses 18 ans, puis a servi pendant 10 ans au bureau du personnel d’une base militaire de l’est de la France, avant de démissionner avec le grade de Sergent puis de cumuler les petits boulots d’agent de sécurité - comme c’est d’ailleurs le cas actuellement.
Elle s’est mariée en 2002 à un certain Christophe Chapert, dont elle a divorcé en 2004.
J’embarque une petite équipe en direction de Bordeaux nord, à son domicile. 20mn après, nous nous heurtons à une porte close. Personne. Dans le hall d’entrée on jette un œil à la boîte aux lettres à son nom qui déborde littéralement de courriers et pubs diverses. Je tire sur un petit papier logoté de la Poste qui dépasse du tas : un avis de passage, daté du 10 mai dernier.
Josse tente de joindre son employeur dans la foulée. Le type qui décroche réagit tout de suite à l’évocation de son nom : Ianski n’a pas donné signe de vie depuis le 2 mai, sans préavis ni justification.
La piste s’étaie donc bien, oui. Mais sans être capable de mettre la main sur elle, nous ne sommes pas beaucoup plus avancés.
- Clause du testament de Sutton sur le cercueil, on reçoit une lettre su timbré, on décide de se rendre à Dardenac ou Sutton est enterré. (CR Brochard)
Il y a plusieurs jours déjà, notre contact anglais nous avez parlé d’une clause un peu spéciale dans le testament de Sutton. La pression du travail et la masse d’information à gérer ne nous a pas permis de nous intéresser à cette clause. Il faut dire que les morts se relèvent rarement de leurs tombes et, quelques soient les dispositions prises, Sutton ne peut être coupable du meurtre des Bazas, des Delmin et de l’anglais.
Bref, nous nous intéressons de nouveau à ce testament, aussi parce que Nemo nous a écrit que tout revient à Sutton. Le testament avait été rédigé par Maignan à l’époque. Et en effet, la clause est surprenante si nous ne prenons pas en compte l’hypothèse que Sutton était une sorte de chef de secte, de gourou.
Sutton devait être enterré à Dardenac mais dans un cercueil assez singulier. Il devait être couvert de dessin dont la forme est particulièrement complexe. Le dessin oscille entre des signes cabalistiques, des circonvolutions bizarres, des signes occultes. Je me souviens qu’en passant un soir devant une salle de concert des jeunes portaient des tshirts avec des signes ressemblants à ceux-là … Encore des satanistes. Sutton se trouve enterré dans le cimetière de Dardenac.
D’un coup, ça me frappe… Dardenac, c’est très proche du lac bleu, l’endroit ou l’on a retrouvé le corps de Melissa Laplace… Melissa, morte sous les coups d’un copycat sordide. Est-ce qu’un malade pense qu’il est possible de réveiller Sutton de la mort en sacrifiant des filles comme Sutton le faisait ???
Cela semble complètement invraisemblable mais avec l’équipe on pense qu’il serait mieux de se rendre sur place… C’est ce que nous allons faire. Entretemps nous recevons le courrier incompréhensible
« Ayant été affranchis du péché et devenus esclaves de la justice ». Pour la première fois j’ai l’impression qu’il y comme des empreintes digitales à cet endroit… Nous devrions peut-être les faire expertiser … « Mais maintenant, étant affranchis du péché et devenus esclaves de Dieu, nous avons pour fruit la sainteté et pour fin la vie éternelle ». Il semble y avoir deux écritures différentes qui se superposent. Comme si deux personnes différentes avaient écrit le même texte au même endroit. « Car le salaire du péché c’est la mort ; mais le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle en Jésus Christ, notre seigneur ».
En attendant je pense que nous devrions sans doute voir le procureur général.
Et les CR de la 6ème session, jouée en 2H30-3h00 je dirai. On a arrêté juste avant le HS Labyrinthe que l'on joue ce soir.
CR Josse
Tellier appelle la juge avec sa liste de courses :
- pouvoir accéder aux écrits de TORRES lors de son réveil brutal de catatonie la nuit du 19 au 20 décembre 2012, celle de la mort de Mélissa LAPLACE, une sacrée coïncidence quand même
- lancer un avis de recherche sur Sophie IANSKI, pour disparition inquiétante
- demander les fadettes + une demande de perquisition, toujours sur Sophie IANSKI
Elle donne son feu vert, même si la paperasse va prendre un peu de temps.
Sitôt reçu l’accord de la juge, Tellier m’affecte aux fadettes de IANSKI : super une mission à haute valeur ajoutée ! mais bon le chef a dit et on est dans la gendarmerie, je ferme donc ma gueule et appelle mon pote Thierry chez Orange. Il me donne immédiatement les fadettes et je promet de lui envoyer la demande administrative en suivant.
On peut pas dire que IANSKI soit une pipelette : à part une pizzeria et un fast food, il n’y a que 2 personnes appelées dans les 3 dernières semaines, 2 messieurs du nom q de MENARD et VANIER. Je devance la demande du capitaine et décide de demander à HUARD de les appeler pour en savoir plus, j’ai déjà accompli une tâche merdique, à son tour !
Huard rechigne mais bon je lui dit que Brochard et Messali eux vont devoir aller à Mont de Marsan, alors si elle veut échanger sa place avec Messali, et se taper en plus 4 heures de bagnoles en tête à tête avec Brochard, pas de problème… ça fonctionne (tu m’étonnes !) et elle se rue sur le téléphone, motivée comme jamais !
Les appels à VANIER et MENARD nous apprennent qu’ils étaient de vieux amis de IANSKI mais rien de spécial. C’est plus intéressant quand elle appelle Christophe CHAPERT, son ex mari. Ils ont divorcés il y a longtemps en 2004 après 2 ans de mariage. Ils sont tous les deux militaires et il raconte qu’elle avait de gros problèmes psychologiques et faisaient beaucoup de cauchemar. Elle était suivi par un psy dans le civil et côté militaire également. Ca a fini par avoir raison de leur mariage.
Bon rien de transcendant mais par acquis de conscience, je demande à Huard d’appeler le psy militaire au cas où. Elle me dit d’aller me faire voir, à moi de reprendre la main sur les tâches ingrates. Je m’apprête à répliquer un truc bien senti quand le capitaine Tellier m’appelle pour me demander de trouver un « spécialiste en sciences occultes » qui pourrait analyser les motifs indiqués dans le testament de SUTTON. Je me retiens très fort de pas lui rétorquer que j’ai que ça a fouttre de trouver un guignol charlatan qui va nous dire n’importe quoi et qu’on est pas dans X-Files mais le protocole militaire étant bien fait, je réponds un simple « bien sûr capitaine, je m’y mets tout de suite » et je raccroche.
Je fais semblant de pas voir Huard qui a tout entendu et se retient difficilement d’exploser de rire. C’est vraiment la journée des tâches à la con !
CR Brochard
Je ne comprends pas toujours les choix de Tellier. M’envoyer voir cette assistante sociale est sans doute une perte de temps … Mais bon, les ordres sont les ordres alors j’embarque Messali en espérant qu’il ne me parlera pas trop de sa grand-mère malade pendant le trajet. Je mets un peu la radio mais pas trop fort. Une heure et demie de chérie FM et de mariage de Messali plus tard, nous arrivons dans la magnifique bourgade de Mont de Marsan.
La préfecture des Landes ne nous attend pas vraiment et la vie s’écoule paisiblement comme le fait la Deuze. Au bout de quelques minutes nous trouvons une place à côté d’un bâtiment administratif défraichi, siège de la DDASS locale. Je sais que le nom a changé, que le monde change mais moi je m’en fous. Je suis vieux. Les jeunes peuvent bien s’adapter encore quelques temps. Le temps que je sois à la retraite … et ça ne va pas tarder.
Bref, nous entrons dans le bâtiment et nous arrivons à un accueil assuré par une fonctionnaire sympathique et parfaitement quelconque. Je sors ma carte et j’explique que nous sommes attendus par Mme Simon pour un entretien. Ça ne doit pas arriver souvent car la personne de l’accueil regarde avec des yeux exorbités son agenda et confirme, non sans mal, qu’en effet, nos noms sont bien inscrits.
Nous entrons donc dans un bureau mal rangé dont la moitié de l’espace est occupé par des cartons fermés. Mme Simon correspond parfaitement à l’archétype de l’assistante sociale, un grand pull en laine informe et sans vraiment de couleurs, une longue jupe que sa mère a pu acheter dans sa période hippie et une tignasse longue et mal peignée.
- Bonjour capitaine, je vous attendais, ditelle avec un grand sourire.
- Bonjour Madame Simon, je suis le capitaine Brochard de la section de recherche d’Aquitaine et voici le lieutenant Messali. Madame, je vais aller droit au but, nous enquêtons actuellement sur des disparitions de jeunes gens entre 15 et 17 ans dans les environs de Bordeaux. Dans le cadre de notre enquête, nous avons appris que vous étiez experte dans ce domaine dans les années 90. Nous aurions besoin d’en savoir plus sur les modes opératoires, surtout pour les années 92 et 93 dans la région bordelaise.
Son visage s’illumine, ça va être son heure de gloire, elle va pouvoir parler de son livre… Je sens déjà que cette discussion va être longue et pénible pour un gain proche de zéro mais je dois être contrarié par les trois heures de route …
- J’ai longuement enquêté, si vous me permettez l’expression, sur les jeunes fugueurs dans les années 90. Je suis moimême une ancienne fugueuse, je suis partie de décembre 90 à mars 91. C’est cette expérience qui m’a poussé à m’intéresser aux fugueurs. J’ai modestement écrit un livre sur les scandales pédophiles dans le milieu bordelais. « Avant Outreau, rumeurs bordelaises ».
- Connaissezvous Hélène Lombardi ? Elle a disparu en 92.
- Non, ce nom ne me dit rien et toutes les personnes citées dans mon livre sont anonymisées…
- Pourriezvous retrouver les noms des personnes concernées ?
- Heu … et bien il faudrait que je regarde dans mes notes mais ça fait longtemps.
- Nous vous tiendrons informés si nous en avons besoin. Pourrions nous disposer de votre livre ?
Son visage s’illumine.
- Oui bien sûr.
Elle se dirige vers un carton, l’ouvre et sors un ouvrage.
- Le voici
Le carton à l’air plein de son livre … Je me demande ce qu’il y a dans les autres cartons de ce bureau.
- Je vous remercie. Nous allons mettre un de nos meilleurs militaire pour la lecture de cet ouvrage.
Dans le même temps je tends le livre à Messali. Je crois discerner un fugace regard de haine …
- Et pourriez vous me dire ce dont vous vous souvenez sur la période 9293 ?
- Et bien, il y avait beaucoup de rumeurs parmi les jeunes. Notamment sur un « homme au yeux vert » ou bien « l’homme du château. Celui ci aurait sévi aux alentours de Dardenac. Il y a plusieurs récits aux alentours de Dardenac vous savez.
- Pouvezvous m’en dire plus ?
- Ce ne sont que des rumeurs vous savez … Je n’ai rien de plus tangible. Mais les jeunes avaient peur de cet endroit.
- Nous vous remercions Mme Simon, nous n’allons pas abuser de votre temps précieux. Je vous remercie pour le livre et je suis certain qu’il contient des informations que nous pourrons exploiter.
Elle semble un peu déçue que nous partions si tôt mais le devoir de la gendarmerie n’attend pas … Et je suis sur qu’ils ont trouvé des trucs intéressants à Dardenac …
CR Tellier
Je sens bien que Brochard est déçu d’être expédié au fin fond des Landes pour explorer une piste fumeuse. Il me darde un regard noir tout en enfilant son blouson. Pas du genre à aimer jouer les seconds rôles, l’ami Brochard. Mais chacun doit jouer le jeu dans la brigade. Pas de divas chez moi.
Il en va de même pour Josse, à qui je demande de ramasser toutes informations susceptibles de nous aider à décrypter les signes cabalistiques du testament de Sutton. Concrètement, contacter les quelques librairies spécialisées en sciences occultes de la ville, mettre le grappin sur un expert, lui faxer les images et voir ce qu’elle peut en tirer. Ne rien laisser au hasard…
Pour ma part, direction Dardenac. Il est temps d’aller jeter un œil à la tombe. Je sais, je sens que j’y trouverai des réponses. Et je sens que c’est à moi d’y aller.
Le cimetière est plus vaste que je ne l’imaginais, bordant la petite église du village, désert, invitant presque à la promenade tant y règne une atmosphère sereine et bucolique. Je passe une tête à la mairie pour demander que l’on m’indique l’allée où trouver la tombe.
Une dalle classique en marbre gris, relativement entretenue sans que l’on puisse néanmoins déterminer que quelqu’un s’en soit occupé très récemment, ou avec une attention particulière. Pas de mentions exotiques, pas de poupées vaudous ni de pentagramme gravé dans la pierre… Je ne sais pas ce que j’espérais trouver mais je ne suis pas prêt à m’arrêter là.
Sur ma faim, je retourne à la mairie interpeller l’agent somnolent qui m’a aiguillé. Je lui demande si d’autres personnes seraient passées récemment pour voir la tombe, s’il a pu remarquer des visiteurs réguliers ou singuliers… Bingo : il s’avère que oui, un monsieur « d’un certain âge » est venu précisément la semaine dernière avec exactement la même demande. Des lunettes, plutôt sympathique… Et c’est Noël, celui-ci a même donné son nom et son adresse en demandant expressément à être contacté si quelqu’un d’autre s’intéressait à la sépulture : Pierre Torrès. Installé à l’hôtel de la Sauve… A 5mn d’ici.
Dozier… Dozier bien sûr.
J’appelle immédiatement la section locale pour demander du renfort – en l’espèce, le brigadier-chef Vidal, accompagné de trois de ses hommes. J’explique que le suspect est inoffensif et qu’il ne sera vraisemblablement pas nécessaire de faire usage de la force. Il est toujours préférable de prévenir, se méfier des excès de zèle, dans l’excitation du moment… Nous nous donnons RDV à 3km de l’hôtel, où nous débarquons tous ensemble, en trombes, devant un concierge tétanisé.
« Torrès » est parti se promener à vélo, comme chaque jour à la même heure. Il devrait être de retour aux alentours de 16h30. Je jette un œil à ma montre : 16h17. Nous fonçons nous planquer dans la chambre après avoir mis en garde le concierge.
Avec la ponctualité d’un coucou suisse, Dozier passe la porte 14mn plus tard. Nous l’interpellons sans même qu’il ait le temps de réaliser ce qui lui arrive… Et probablement avec plus de brusquerie que la situation ne le justifie. Il se détend immédiatement et se laisse faire sans broncher.
Enfin… Avec Dozier, nous tenons une partie de la clé. Je plante mon regard au fond du sien, impassible. « Je suis là pour Hélène »… Il ne manifeste ni réaction ni émotion. « Embarquez-le ».
J’appelle toute la brigade pour leur dire de rapatrier ventre à terre à la GN. Je contacte également la juge, qui me demande de lui rappeler le statut de Dozier dans cette affaire. Difficile de répondre à sa question à ce stade… Indic, témoin, complice… En tout état de cause, et quelle que soit l’aide précieuse qu’il nous apporte depuis quelques jours, c’est un individu qui a fait entrave à la justice, et à plusieurs reprises… Il va falloir démêler cet écheveau de contradictions.
Je roule à tombeau ouvert, pressé d’en découdre. Alors que je suis sur le point d’arriver à la GN, mon téléphone sonne. Marie… Marie qui me rappelle le déjeuner d’anniversaire de mon fils dimanche, avec toute la famille. A mille lieux de mes préoccupations ; évidemment je lui jure mes grands dieux que je n’avais pas oublié, et que je serai présent. Que dès que cette affaire sera terminée, je lèverai le pied… Combien de fois a-t-elle entendu ces promesses… Elle ne prend même pas la peine de répondre.
CR Josse
Après 3 appels à des experts du domaine charlatans - rien que le nom de leur « cabinet » prête à sourire : voyance 2000 (alors qu’on est en 2012), nostradamus services et voyance et avenir – je me dis que je suis pas au bout de mes peines. J’ai vraiment intérêt à avoir cette promo ! Je me reconcentre et décide de tenter ma chance plutôt vers des librairies ésotériques. J’en trouve une, Le Signe Jaune, où la personne au bout du fil me parait être moins illuminée que les autres. J’obtiens son intérêt quand je lui parle d’une enquête où nous avons trouvés des signes « cabalistiques » pour lequel nous aurions besoin de ses lumières et il me dit de passer quand je veux pour lui montrer les dits signes. Pff enfin !
Tant qu’à être dans les trucs chiants, je décide d’aller au bout et d’appeler le docteur Ivo LIVY, le psy militaire de IANSKI. Après avoir décliné mon identité et lui avoir donné un peu de contexte, je lui explique que son ex patiente a disparu et que j’aurais besoin d’avoir des infos concernant son état psychique en brodant un peu sur ce que nous a dit son ex mari. A ma grande surprise, il accepte de passer outre le secret médical et de me révéler que Sophie souffrait de stress post traumatique. Elle lui a confié avoir été enlevée et violée quand elle était adolescente mais il ne l’a pas cru… Mon instinct me crie immédiatement 2 choses : 1) que ce psy est un con et 2) que j’ai un mauvais pressentiment sur la suite. J’enchaine directement en lui en demandant plus de détails et il me révèle qu’elle a mentionné également une copine, Rachelle, qui avait été « mis en cage, comme elle » c’est d’ailleurs pour ça qu’il ne l’a pas cru, trop gros. Je raccroche rapidement, sonné par le choc de la nouvelle et prends une grande inspiration avant d’appeler Tellier pour lui annoncer la nouvelle : le récit de Marc LOMBARDI est vrai, il y a vraiment eu des ados encagés et Sophie IANSKI en fait partie !!!
Vendredi 17 mai – CR Brochard
Sophie Ianski, la femme qui a besoin de tellement de menottes qu’elle pourrait fournir une brigade territoriale de la gendarmerie nationale. Depuis que nous nous sommes déplacés chez elle, Tellier a demandé une autorisation de perquisition de son appartement. Nous avons déjà pas mal d’informations sur elle, ancienne militaire, mariée mais déjà divorcée… des problèmes psy. Bref, elle a un profil parfait pour être une meurtrière en puissance. Si on ajoute à cela le fait que les menottes retrouvées sur la scène de crime correspondent parfaitement à celles commandées en masse par Sophie Ianski … La juge n’a pas mis longtemps avant de nous accorder l’autorisation de perquisitionner chez elle … Mais avant nous avons d’autres chats à fouetter. Tellier et Josse viennent de ramener Dozier à la caserne.
Ça c’est une bonne nouvelle, nous allons enfin arrêter de jouer au chat et à la souris avec Nemo. Nous allons sans doute en apprendre plus sur cette affaire maintenant que nous l’avons sous la main.
Dozier est en garde à vue chez nous et il est mené en cellule. Tout cela se passe dans un grand calme. Le bonhomme ne se rebelle pas, il a l’air assez serein. Un militaire nous amène Dozier dans notre bureau qui ressemble de plus en plus à un antre de fauve.
Tellier commence à lui notifier sa garde à vue et à lui dire qu’il peut être assisté d’un avocat. Etonnement Dozier prend la parole :
- Je souhaite passer un coup de fil à mon avocat et je ne parlerai pas tant qu’il ne sera pas là.
Je suis atterré par cette réponse. Ce type nous donne des infos depuis plusieurs jours et au moment ou il peut parler à visage découvert, il refuse de nous parler au plus vite. Je ne comprends pas.
Il passe son coup de fil et assez rapidement c’est Maitre Maurrin, Charles Guillaume Maurrin… Un des ténors du barreau bordelais … Comment cet humble retraité peu se payer ce type. Bref, ça risque de ne pas être une partie de plaisir car il connait bien la procédure. En même temps, comme il ne peut pas intervenir mais juste vérifier que nous respectons bien la procédure on devrait pouvoir s’en sortir. Dozier n’a pas l’air d’un criminel endurci.
L’entretien peut enfin commencer. Les premières questions sont d’usage, identité, adresse et toutes informations permettant de dater la GAV. Les choses sérieuses peuvent enfin commencer :
- M. Dozier, vous êtes aussi Nemo n’estce pas ? demande Tellier
- Je ne vois pas de quoi vous parlez, répond tranquillement Dozier.
- Vous avez été reconnu dans un cyber café et nous savons que vous nous avez contacté sous le pseudonyme de Nemo pour nous communiquer des informations sur une affaire en cours.
- Je ne répondrai pas à cette question.
L’attitude de Dozier est perturbante. Il sait beaucoup de chose et il n’a pas hésité à nous les communiquer mais maintenant il refuse de parler… Je ne comprends pas et quand je vois les têtes des autres, ils partagent visiblement mon incompréhension. Pourquoi ce gars, si prompt à nous communiquer des informations sur l’affaire refuse désormais de nous parler et laisse des protagonistes anciens se faire tuer …
- Avezvous un lien avec l’affaire lombardi ? demande Josse
- Je ne vois pas de quoi vous parlez, répond Dozier un peu comme un robot.
Je vais chercher la photo de Dozier avec la famille Lombardi et je la tends tranquillement à Dozier.
- Hélène Lombardi était votre filleule n’estce pas ?
Il a l’air un peu de tiquer.
- Heu … oui
- Et bien en ce moment d’autres Hélène Lombardi sont peut être en cage, elles vont peut être mourir demain. Vous détenez peutêtre des informations qui peuvent faire avancer la justice. Des informations qui peuvent sembler anodines pour vous mais qui peuvent être cruciales pour la justice. Nous pouvons sans doute sauver des vies grâce à ce que vous savez M. Dozier.
Je sens que mon petit speech touche un point sensible, surtout lorsque j’ai utilisé la photo. Le visage de Dozier a semblé s’illuminer un instant mais finalement il se referme aussi vite.
- Vous ne pouvez rien faire. La justice est déjà en marche.
- Que voulezvous dire par là ?
Dozier se referme complétement et se mure dans le silence. Tellier décide de relancer l’interrogatoire.
- Quel lien avezvous avec Torres ?
- C’est mon compagnon, répond Dozier.
- Comment expliquez vous qu’il soit sorti de sa catatonie pour une brève soirée ? demande Josse.
- Je n’en sais rien.
- Estce que vous croyez en la sorcellerie ? continue Josse
Dozier semble réfléchir avant de répondre à cette question que je trouve un peu incongrue.
- Il y a des choses que vous ne pouvez pas comprendre, assène enfin un Dozier un peu énigmatique.
Un blanc suit cette réponse digne d’un film de série Z. Pour dérider un peu l’atmosphère je demande à Dozier s’il fume.
- Non, pas du tout.
- Souhaitezvous sortir un peu ?
- Je vous conseille de ne pas sortir M. Dozier intervient l’avocat.
- Maitre, vous n’avez pas à intervenir. Il est parfaitement réglementaire de proposer une pause à une personne en garde à vue.
L’avocat me mitraille du regard mais il sait parfaitement que j’ai raison. Il sait aussi que les GAV ont tendance à parler lorsqu’ils boivent un café ou fument une cigarette avec un gendarme sympa … Cela peut changer le cours d’une GAV. Mais ce stratagème simple ne fonctionne pas cette fois ci.
- Non je vais rester ici.
- Nous allons mettre fin à cette première série de question M. Dozier, dit Tellier calmement. Nous allons vous reconduire en cellule.
Un militaire vient accompagner Dozier en cellule, toujours aussi calme et serein.
A ce moment là mon téléphone sonne, c’est le code pour Anais … Ce n’est vraiment pas le moment. Je sors du bureau, m’isole dans le local à photocopieuse et je décroche.
- Allo
- Oui, chéri, je t’appelle, c’est pour Dylan. Il s’est fait arrêter dans une manifestation. Il est enfermé par la police. Il faut que tu fasses quelque chose…
La voix d’Anaïs est très angoissée et je ne me vois pas lui dire que ce n’est vraiment pas le moment.
- Ecoute chérie, ce n’est sans doute pas bien grave. Il ne risque pas grandchose, au pire il fera 48 heures de garde à vue.
- Mais … mais tu vas faire quelque chose hein ?
- … oui bien sur mon amour.
Quelle galère. J’aime bien ce mec mais là ce n’est pas le moment. Je cherche rapidement dans mon portable et la chance est avec moi. Nous avons travaillé sur une affaire avec le capitaine Bouvier il y a peu de temps. Ce jeune est bien sympa alors je me dis qu’avec un peu de chance il pourra faire quelque chose pour Dylan. Je l’appelle.
- Salut Bouvier, c’est Brochard de la SR Aquitaine.
- Ah … oui Brochard, salut. Tu vas bien ?
Je sens dans sa voix que le gars est pressé mais il n’ose pas m’éconduire. Un contact dans la GN ça se ménage.
- Je vais être direct, tu as un GAV, Dylan … C’est … disons de la famille. Estce qu’il a moyen de le faire sortir ?
- Dylan ?? Tu rigoles, c’est grave. Il y a insultes sur agents de police et sans doute voie de fait. Il n’était pas seul et il y a des témoins, En plus ce co… euh … ton mec est en train de faire le malin dans la cellule. Je ne peux pas le faire sortir alors qu’il gueule sur tous mes gars.
- Je comprends Estce que tu peux me le passer ?
- Oui bien sûr.
J’entends alors le tumulte du commissariat. En bruit de fond, je comprends que les cellules sont pleines et que les GAV sont très agités. Ça gueule, j’imagine que ça pue… Bref, un commissariat banal.
- Ouais, Daniel, c’est toi ? Quand est ce que tu me fais sortir ? demande Dylan sans l’ombre d’une réflexion sur la gravité de ses actes.
- Dylan, tu te rends compte de ce que tu as fait ?
- Arrête Daniel, tu sais très bien que ce sont des pourritures et que si tu n’avais pas ton devoir de réserve, tu serais dans la rue avec nous.
- Oui mais si tu veux sortir, il va falloir faire profil bas. Je n’ai pas le bras aussi long que tu ne l’imagine.
- Ouais mais ce sont des pourris et …
- Il faut que tu te calmes et pour sortir, que tu te taises. Faisle pour Anaïs, tu sais qu’elle est folle d’inquiétude.
- Ouais, ça va … je vais me calmer.
- Ne déconnes pas Dylan, sinon ils ne te laisseront pas partir.
- Ok ok …
- Bon repasse moi Bouvier.
Le téléphone change de mains et Bouvier reprend la conversation.
- Alors ?
- Il va se calmer. Tu peux faire quelque chose ?
- Tu m’en dois une Brochard et s’il se tient à carreau, il sera dehors demain matin.
- Je t’en dois une Bouvier, merci.
Je rappelle Anaïs pour la prévenir que ça devrait être réglé demain…
Quelle journée de merde.
CR Tellier
10h : l’autorisation de perquisition des affaires de Torrès tombe enfin.
Toujours plein de ressources, Messali en profite pour expliquer qu’il a déjà glané quelques informations intéressantes sur Torrès. Celui-ci semble avoir été l’auteur de plusieurs bouquins, dont un « vendanges de sang », roman fictionnel traitant vraisemblablement d’un culte satanique sévissant dans la région de Bordeaux. Messali a pu s’en procurer un exemplaire qu’il a parcouru à la hâte ; il me dit que ce qui l’a le plus interpellé, c’est que la description des sacrifices auxquels ce culte obscur soumettait ses jeunes victimes lui semblait faire beaucoup écho à notre propre affaire.
J’espère vraiment que la perquise nous permettra de mettre la main sur quelques éclairs de lucidité… Il semble que l’ami Torrès dispose de beaucoup d’informations sur notre vieille affaire, encore faut-il que celles-ci puissent émerger des brumes de son esprit dévasté…
J’appelle la juge pour la tenir informée des récents développements – maigre butin malgré tout, la réserve de Dozier ne nous ayant pas encore permis de faire une avancée significative.
2mn après avoir raccroché, on m’amène un nouveau courrier.
CONVICTA ET COMBUSTA… “CC” !!
Google nous apprend qu’il s’agit des initiales utilisées sur les procès en sorcellerie au Moyen-Age. « Condamné et brûlé ».
Les auteurs de la cabale vengeresse qui s’est abattue sur les Bazas et leur cercle souhaitaient ainsi nous désigner leurs victimes comme des « sorciers » ? Et habiller leur crime d’une vertu inquisitoriale. Pourtant : Nemo judex in re sua…
Comme à chaque nouvelle missive, les conjectures et analyses vont bon train dans la brigade. Ce qui apparait clairement est que nous faisons face à deux modus operandi distincts sur une même scène de crime : la mise à mort militaire et maîtrisée des Delmain, le châtiment par les flammes pour les autres. Plusieurs auteurs, c’est de plus en plus une évidence… Nos encagés, seuls, ou secondés par des veilleurs, des proches ? Quelque part au fond de mon esprit une petite voix me dit que nous avons négligé, depuis plusieurs jours, de contacter les membres survivants de la famille Lombardi…
Laissant ma réflexion suivre son cours, j’invite Brochard et Josse à m’accompagner à l’ULS Harmonie.
On nous explique qu’il est impossible de parler à Torrès, qui a été lourdement sédaté, mais on nous laisse enfin accéder à ses carnets.
Nous commençons par ouvrir le plus récent. Les premières pages sont des notes d’écrivain, des jets d’idées éparses, un début de structure. Puis plus rien, des pages et des pages blanches.
Cela reprend au milieu du carnet, mais en travers des doubles-pages cette fois. Au fur et à mesure des pages, l’écriture se retrécie de plus en plus, de moins en moins lisible, alors que les marges s’agrandissant, emplies de traits et hachures qui cheminent comme un labyrinthe et se densifient…
Alors le dernier arrive. Y a juste un joueur qui a pas fini de rédiger (Oui toi, tu le sais très bien - regarde comme tu nous fous la honte!!) 😁