Les JdR sont-ils plus sages qu'avant ? 232
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Pas ceux qui visent le même public de niche qu'avant.
Et dans le même temps on a bien plus de Jdr expérimentaux qu'avant. Sans même parler de la qualité qui c'est envolé, que ce soit sur les dessins, l'écriture, les papiers utilisés, la maquette...
Je n'ai vraiment aucun regret concernant cette ancienne époque.
- Sammy
alanthyr
Mais le souci, c'est que ce que je vais trouver trash ne le sera pas forcément pour un autre.
Existe-t-il un JDR qui fait l'unanimité pour son côté subversif ? Je n'en sais rien ...
Il y en a Fatalement un, Celui-Qui-ne-Doit-Pas-être-Nommé...
Plus sérieusement, si il y a des thèmes qui ne passerait plus aujourd'hui dans un produit "grande distribution", genre INS original ou une couverture inspirée des couvertures originales "J'ai Lu" du cycle de GOR, à l'inverse Toscani (les affiches Benetton) pourrait faire la couverture d'un jdr aujourd'hui avec une paladin noir de peau protégant un guerrier blanc de son bouclier sans que ça ne heurte grand monde.
Et à l'époque, INS choquait certains ... c'est juste que les personne "choquable" avait peu de chance de le voir, ou de faire entendre leur désapprobation du grand public.
Aujourd'hui, un tweet d'une blague raciste à l'embarquement d'un avion, et ta vie est ruinée à l'atterissage .
"Plus sage" ou "principe de précaution" ... qui peut le dire.
Dans l'ensemble, ce n'est pas plus mal. Tant qu'on ne va pas dans l'excès et passer du "sage" à la censure. Ce qui est toujours un risque, hélas.
- Tiramisu Rex
Mais vous parlez des jeux de rôle de quel pays ? Parce que ce qui était "sage" en France en 1990 n'était pas la même chose que ce qui était "sage" aux Etats-Unis à la même époque, et ce qui ne pose pas de problème en France de nos jours ne passe pas forcément crème chez nos amis américains. Et je pourrais reposer la question avec les jeux de rôle allemands ou japonais.
Notez que la plupart des généralités qui sont dites plus haut seraient à nuancer fortement en fonction du lieu. Le fait qu'on utilise massivement des moyens de communication fabriqués ou hébergés aux Etats-Unis ne doit pas faire oublier les différences très nettes de cultures et de cadres légaux dans différentes parties du monde.
Le bon vieil ancêtre Donjons & Dragons a causé une panique morale dans les milieux de la droite conservatrice américaine il y a vingt ou trente ans (je ne sais plus exactement). Pendant ce temps, on y jouait tranquillement en France.
En 1998, en France, c'est le principe même de jouer un rôle et d'être encadré par un maîîîître de jeu qui a donné des sueurs froides au grand public à cause d'une émission de télé qui mélangeait tout avec une sombre histoire de secte et de suicide. À cette époque, pour pas mal de gens et pour les autorités, tous les jeux de rôle étaient sulfureux. Faut-il regretter cette période ? En ce qui me concerne, je n'en ai aucun regret.
Vingt ans après, non seulement les jeux de rôle ne sont plus sulfureux en France, mais c'est la culture geek qui est passée en partie auprès du grand public. Davantage de gens connaissent les notions de base de la SF, de la fantasy et du fantastique et certaines de leurs figures iconiques. Quand mes parents m'ont offert L'Appel de Cthulhu 5e édition dans les années 1990, Lovecraft n'était pas très connu en France en dehors des milieux de ce qu'on regroupait encore souvent sous la seule étiquette de la "science-fiction" ou du "fantastique" (ou, au mieux, des "paralittératures"). La plupart des gens dans le grand public n'avaient jamais entendu parler de Lovecraft. Cthulhu et les Grands Anciens, avec leurs adorateurs prêts à tuer, torturer, posséder mentalement, rendre fous etc. leurs victimes, étaient des personnages terrifiants. Et puis on a commencé à vendre des peluches Cthulhu. De nos jours, on en fait des séries sur Netflix, le personnage apparaît dans un nombre ébouriffant de cross over, mais aussi de parodies. La terreur qu'il inspirait s'émousse. C'est un peu comme Dark Vador qui finit avec une tête de chibi et des pupilles toutes mimi surdimensionnées. Le succès du mythe de Cthulhu a engendré la naissance de nouveaux clichés, on frise la nausée devant la multiplicité de ses déclinaisons - et si c'est mon cas en France, qu'est-ce que ça doit être aux Etats-Unis... Bref, il ne surprend plus autant qu'avant, il n'effraye plus autant qu'avant. Le concept de méchants aliens qui n'attendent que la prochaine conjonction stellaire pour sortir de leur boîte et rendre tout le monde gaga fait sourire.
En plus de ça, dans l'intervalle, l'histoire des genres de l'imaginaire a avancé. Ce qui était à la pointe de l'effrayant ou du subversif à l'époque ne l'est plus maintenant. Les lovecrafteries sont appréciées mais de plus en plus menacées par le cliché.
Qui d'autre a souffert de ça ? Les vampires. Eh oui, la "bit-lit" est passée par là, les séries comme Buffy et True Blood aussi, Twilight aussi (les pauvres). Un jeu de rôle où l'on joue des vampires semble moins subversif de nos jours parce qu'on s'est habitués à des fictions où on peut se mettre à la place de ces monstres abjects pauvres bêtes. Alors si en plus le principe même du jeu de rôle ne sent plus le souffre, décidément, c'était mieux avant !
Y a-t-il un "lissage commercial" des jeux de rôle ? Franchement, je ne crois pas. L'offre s'est considérablement diversifiée et cela lui permet d'initier un public beaucoup plus vaste et varié qu'auparavant. Pour moi, c'est tant mieux. Parce que dans le même temps, les jeux qui abordent des thèmes difficiles et/ou qui adoptent un ton cru continuent à exister. Des exemples ont été cités plus haut. Si on a du mal à les trouver, c'est peut-être tout simplement parce que dans les boutiques les rayons jeux de rôle sont plus restreints qu'avant et ne suffisent plus à être représentatifs tout ce qui se fait en ce moment (même de gros projets financés en ligne ne sont plus nécessairement très présents en boutique), tandis que sur Internet la production est si pléthorique que ce n'est pas si simple de trouver ce qu'on cherche, même avec les forums et les réseaux sociaux.
Ce qu'on voit en ce moment, c'est que les grandes boîtes américaines du divertissement, tous supports confondus, sont soucieuses de leur image de marque et n'ont pas envie de multiplier les frais de justice, comme n'importe quelle entreprise. Donc elles balisent et elles communiquent beaucoup de manière consensuelle. Mais si ça vous paraît nouveau, c'est que vous avez oublié ou jamais appris l'histoire des Etats-Unis, parce que les grandes entreprises américaines ont toujours fait ça.
[message supprimé]
Oui je lis des choses intéressantes, entre les posts porte nawaks (vos histoires de puceaux gardez les pour ailleurs svp). C'est vrai, il n'y avait pas Internet avant. C'est vrai que la provocation se limite plus aux jeux de niche aujourd'hui. C'est vrai que les américains étaient plus puribonds (leur version de INS/MV avait un ange bodybuildé en couverture).
Mais il n'empêche, aujourd'hui, par exemple, je lis l'avertissement de ONE%, je me dis ouah attention, je vais pas m'en remettre... Tout ça pour voir des dessins de filles en bikinis je me dis ah ouais, l'époque a changé quand même. Et pourtant c'est un jeu de niche.
Cela dit, il y a des contre-exemples. On en revient à ce que je disais. Dans ce qui est affiché, rien ne me choque. Dans les textes, oui je suis encore choqué. Est-ce à dire que les éditeurs sont plus malins ? Dans Le Journal de Beckett, il y a des scènes hardcores par exemple, mais il faut aller les chercher dans les 450 pages.
[citation supprimée]
Je ne vois pas trop ce que RNP vient faire là dedans. On a notre ligne à nous, on n'est pas là pour faire du trash parce que ça ne nous intéresse pas, surtout si c'est non-justifié (on n'a pas besoin de faire du "pas sage" pour faire comme si on était des super provocateurs, ce qui n'a aucun intérêt en soi...).
Et surtout on aborde des choses que je trouve plus intéressant que le trash et le malsain pour le trash et le malsain (comme le côté très adolescent "je vais faire du trash et je vais choquer tout le monde" de prods comme Lamentation of the Flame Princess).
Quant aux minorités, je ne vois même pas de quoi on parle.
Après, je me demande quand même ce qu'on appelle "sage" dans ce fil. Faire du trashos ? Si je reprends la couverture du début du fil, elle est moche. J'espère donc en effet qu'on n'aura plus de couvertures aussi laides à l'avenir. Mais... en terme de compo ? Je ne vois absolument pas ce qu'elle a de "pas sage" et en quoi on ne pourrait pas avoir une couverture du genre. Un pape méchant ? Ca ne ferait lever le sourcil à quasiment personne, surtout en France.
- Griffesapin
- et
- Noob
tu ne pourras pas comprendre: Edwin reprend un message de ma part qui répondait à l'un des tiens... mais le mien à disparu : ZAP .
je t'envoie un MP.
bah le sens de mon propos, c'est que pour avoir un produit de masse, il faut être de plus en plus feutrer sous risque de se faire broyer au pilori.
Je ne sais pas si le jdr est vraiment plus sage, mais en tous cas il est beaucoup plus dans le consensuel et se cale dans l'air du temps AMHA.
Là non plus, je ne vois pas le rapport avec le fait que la couverture soit moche ou pas, la provocation n'a rien à voir avec l'esthétique. En 1988, un cinéma a été incendié parce qu'il projetait LA DERNIERE TENTATION DU CHRIST et cette couverture, moche ou pas, était présente dans les boutiques de jeux en 1991. Imagine, la même avec un représentant musulman trois ans après un attentat...
- Julien Dutel
Ça ne serait pas la même et tu sais, les fondamentalistes chrétiens sont toujours très actifs, surtout aux us. Quant à l'islam tu ne peux pas décemment comparer la situation a l'époque avec la chrétienté et l'actuelle avec certains extrémismes.
La même couverture aurait la même réaction. Point. Si tu la transposes sur autre choses les réactions seront diff⁷érentes.
De même tu ne peux pas comparer le traitement d'un cinéma incendié dans les medias et la société avec celui des attentats. Ne serait-ce que parce que les medias ont toujours du mal a parler d'attentat quand ce sont des chrétiens (Christchurch était un attentat terroriste quoi qu'on en dise).
Bref comparer ce qui est comparable. Les tensions sont très différentes selon les confessions
bah le sens de mon propos, c'est que pour avoir un produit de masse, il faut être de plus en plus feutrer sous risque de se faire broyer au pilori.
Alessandro Zanni
Je ne sais pas si le jdr est vraiment plus sage, mais en tous cas il est beaucoup plus dans le consensuel et se cale dans l'air du temps AMHA.
Pas vraiment. Citer quelques contre exemples comme ins ne fait pas un constat général.
- Alessandro Zanni
c'est mon ressenti à la lecture, entre anciens jeux, jeux récents et même thème.
Heu, pour Christchurch, personne n'a jamais nié que c'était un attentat terroriste, c'est dans tous les journaux anglais comme français, et c'est le chef d'accusation retenu ainsi que le verdict prononcé. Si le but c'est d'essayer de ramener ça a des motifs religieux, il ne faisait à ce que sache parti d'aucune communauté et aucune communauté n'a non plus revendiqué ses actions. C'est juste un mec complètement perché qui a été enfermé à vie je vois pas du tout le rapport avec la discussion
Même l'humour, c'est une légère exagération. Il ne s'est pas assagi, il s'est transformé. Les sujets acceptables ou non se sont déplacés, et effectivement il y a des choses que l'on n'accepte plus, tout comme des choses que l'on accepte plus (+).
Le JDR a suivi la même voie. Il a grandi, est sorti de ses provocs d'ado, a réfléchi. Ca ne l'empêche pas de proposer des trucs sombres, trashos ou autre, même parfois de retomber dans la provocation facile. Mais il a grandi, il s'est posé des questions sur ce qu'il véhiculait, aussi... parce que par essence, toute oeuvre, même ludique, véhicule un propos (même les films de Michael Bay)...
Le JDR est-il si sage quand il soulève l'ire de certains parce qu'il change certains points de vocabulaire, parce qu'il outrepasse certains principes de la langue que certains voudraient immuables ? Est-il sage quand il aborde des sujets et se fait accuser de devenir presque militant ? En bref : est-ce qu'une oeuvre qui provoque à une partie de la population l'envie de taper sur les "nouvelles modes" du JDR est sage ? Je ne pense pas. Et je pense qu'au final, la seule différence, c'est que sa "non-sagesse" et sa transgressivité touche les acquis des personnes qui s'en plaignent. Tout à coup, il ne sont plus du côté des transgressifs mais des transgressés.
Si le JDR était sage, ce fil n'existerait pas.
- Alessandro Zanni