L'influence de l'Actual Play sur le Jeu de Rôle 337
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Quand Sam Riegel interprète sa petite gobline dans la seconde campagne de critical role, personne ne se pose de question, par exemple.
Julien Dutel
Oui, mais c'est une petite gobeline (à savoir une créature pas vraiment humaine et, donc, avec un comportement différent). Pas une femme qui tenterait par exemple de séduire un autre personnage... Et là, lui s'en sortirait peut-être très bien quand même... Moi, vu mes capacités d'interprétation d'un rôle, je risquerais juste de faire éclater tout le monde de rire.
Ce n'est qu'en passant à la troisième personne aux moments émotionnellement tendus que j'ai réussi à incarner mon personnage de Grey Hawk, une spécialiste des armes au lourd passé d'enfant maltraitée, de façon à peu près crédible.
Mais le problème, avec les personnages masculins, féminins, transgenres ou sans genres*, c'est que dès qu'on sort de notre propre "catégorie", on risque très vite de sombrer dans la carricature. Et là, ça peut vraiment gâcher l'ambiance que l'on souhaite instaurer.
Certainement parce qu'il est nécessaire de ne pas catégoriser les comportements. Un personnage est un personnage. Ce n'est pas son genre qui le définit fondamentalement, mais ce qu'il a vécu. Quand on a demandé, à l'époque de Buffy, à Joss Whedon comment il faisait pour écrire des personnages féminins aussi "empowered" et intéressants, il a répondu (pour paraphraser) "je les écris comme j'écris un personnage masculin".
Quand j'interprète un PNJ féminin, j'allège un peu ma voix. Mais je l'interprète exactement comme un autre personnage : en fonction de sa personnalité. Et si je tombe dans un stérétoype de genre c'est à dessein (et souvent de manière un peu exagérée et comique).
En fait, on est bouffés par nos stéréotypes de genre. Mais il sufit de les mettre de côté et de jouer des personnages...
* N'étant pas homosexuel, j'aurais beaucoup de mal à incarner un homme attiré par les hommes sans risquer de vexer un homosexuel à ma table, par exemple. Je trouve donc là aussi préférable d'éviter de jouer certines émotions à la première personne...
Et là encore, pourquoi ? Un homosexuel, à moins de tomber sur une "queen" (on remarquera les guillmets, mais bref, la caricature de l'homosexuel exhubérant), c'est une personne comme une autre. C'est pas dur de l'interpréter : on l'interprète comme un homme qui aime les femmes, sauf que s'il drague quelqu'un, il draguera un homme. Et... voilà...
Regardes une série comme October Faction par exemple, on a un personnage principal gay un secondaire qui se révèle gay... et... ben il est joué comme un personnage normal. Il n'a pas d'attitude particulière, juste ils roule des pelles à des mecs.
En réalité, comme je dis au dessus, les stéréotypes nous bouffent. Quand on s'en débarrasse et que tout ça devient un personnage avec un histoire qui le définit, ça change notre rapport à notre "performance".
Pour l'exemple de RnP :
- Fan'Goriah. C'est un personnage posé, sage, peu prompte à la colère, triste des événements qui ont amené les PJ à leur position. Elle a perdu des personnes importantes... voilà. J'adopte donc un ton posé, calme, j'essaie d'en faire une sorte de guide pour les PJ. Son comportement est influencé par ces données là, pas sa féminité
- Lorien Gayle. Plus vive, sorte d'agent secret, intelligente, qui a un peu de répartie, de la malice... séductrice parfois... voilà...
- La PNJ que je ne nommerai pas du début de l'épisode 4 saison 4. Hautaine, aristo, elle pense que les autres lui sont inférieurs, elle a un regard paternaliste sur les PJ, elle donne des leçons.... j'aurais pu en faire un homme aussi... sans rien changer à l'interprétation
Je comprends qu'un acteur comme Julien sera beaucoup plus à l'aise que moi pour endosser ce genre de rôle et de situation, parce que ça se travaille. Mais, précisément, je ne l'ai pas travaillé. Et n'étant pas acteur, j'ai donc tendance à surjouer quand je cherche à interpréter une émotion.
Gollum
Oui mais ça, c'est valable pour tous les PNJ, masculins comme féminins. Il n'y a pas d'émotion sépcifique aux hommes et aux femmes.
Oui, mais c'est une petite gobeline (à savoir une créature pas vraiment humaine et, donc, avec un comportement différent). Pas une femme qui tenterait par exemple de séduire un autre personnage... Et là, lui s'en sortirait peut-être très bien quand même... Moi, vu mes capacités d'interprétation d'un rôle, je risquerais juste de faire éclater tout le monde de rire.
Pas plus que si tu joues un homme sui tente de séduire une femme en fait. C'est juste que tu as la trouille de le faire et/ou que les conventions sociales font que ça fout tes co joueurs pas super à l'aise. Mais sinon, non, il n'y ait pas de raison qu'il soit différent de jouer Greay Hawk, femme à l'enfance matraitée que Gary Hawk, homme à l'enfance maltraitée. Ce sont les mêmes. Joue le comme Gary Hawk et tu verras que ça passera tout seul. Et ce même sans changer de voix.
- Utilisateur anonyme
Ouah ! Merci infiniment de tes deux réponses Julien. Elles vont me permettre de sacrément m'améliorer... Oui, c'est uniquement parce que j'ai la trouille de le faire, je dois bien le reconnaître... C'est la peur d'être ridicule, ou de heurter, voire les deux en même temps... Les conventions sociales ne m'ont jamais posé problème (la seule à laquelle j'adhère véritablement étant le respect d'autrui)...
Penser au rôle et pas au côté masculin, féminin ou autre... C'est vraiment un conseil extraordinaire ! Merci encore.
On rejoint un peu une des propédeutiques d'un bon MJ, à savoir, avoir confiance en soi. Si on sent que quelque-chose n'est pas fait pour soi, se forcer est rarement concluant.
En fair ce n'est pas une histoire de se forcer, c'est d'arrêter de vouloir "faire différent parce que c'est une femme".
[citation supprimée]
Les neurosciences c'est une chose. Maintenant, on ne parle pas de comportementalité fondamentale, on parle de personnages de fiction. Et pour bosser depuis deux décennies avec des comédiennes, la réalité c'est que :
- Elles en ont ras le cul qu'on leur écrive des personnages "féminins" (qui respectent "es gestes, les paroles et les réactions" de la psychologie dite féminine dans lequels elles ne se retrouvent jamais)
- Elles parlent de leur personnage comme un homme parle du sien, avec les mêmes fondamentaux.
D'ailleurs, j'ai lu autant de théories sur la différenciation que d'article les démontant... et de ce que je pratique, personnellement, je ne vois concrètement aucune différence fondamentale d'approche de l'émotion et de la construction du personnage entre hommes et femmes.
- WolfRider4594
. Un personnage est un personnage. Ce n'est pas son genre qui le définit fondamentalement, mais ce qu'il a vécu. Quand on a demandé, à l'époque de Buffy, à Joss Whedon comment il faisait pour écrire des personnages féminins aussi "empowered" et intéressants, il a répondu (pour paraphraser) "je les écris comme j'écris un personnage masculin".En fait, on est bouffés par nos stéréotypes de genre. Mais il sufit de les mettre de côté et de jouer des personnages...
* N'étant pas homosexuel, j'aurais beaucoup de mal à incarner un homme attiré par les hommes sans risquer de vexer un homosexuel à ma table, par exemple. Je trouve donc là aussi préférable d'éviter de jouer certines émotions à la première personne...
Et là encore, pourquoi ? Un homosexuel, à moins de tomber sur une "queen" (on remarquera les guillmets, mais bref, la caricature de l'homosexuel exhubérant), c'est une personne comme une autre. C'est pas dur de l'interpréter : on l'interprète comme un homme qui aime les femmes, sauf que s'il drague quelqu'un, il draguera un homme. Et... voilà...
Regardes une série comme October Faction par exemple, on a un personnage principal gay un secondaire qui se révèle gay... et... ben il est joué comme un personnage normal. Il n'a pas d'attitude particulière, juste ils roule des pelles à des mecs.
En réalité, comme je dis au dessus, les stéréotypes nous bouffent. Quand on s'en débarrasse et que tout ça devient un personnage avec un histoire qui le définit, ça change notre rapport à notre "performance".
Oui mais ça, c'est valable pour tous les PNJ, masculins comme féminins. Il n'y a pas d'émotion sépcifique aux hommes et aux femmes.
Julien Dutel
Entièrement d’accord avec ça.
Et merci pour les exemples. Quand tu joues Fan’goriah, je vois une prêtresse femme, pas Julien le MJ. Quand tu joues la sorcière de la mer arachnide, je vois une vieille femme.
Encore une fois, je trouve ça naturel et je ne me pose pas une seule fois la question de la légitimité ou de la pertinence pour un MJ homme d’incarner des femmes à la 1ère personne.
Là où je vois plus le risque de caricature, c’est lorsque un joueur joue un personnage du sexe opposé. Mais je ne l’interdis jamais. J’ai souvent trouvé moins crédible l’interprétation des joueurs qui ont fait ce choix.
Ce qui peut se résumer en les femmes sont des êtres humains comme les autres. Cela marche aussi pour les homosexuels, des deux sexes, qui sont aussi des êtes humains comme les autres. Quand on interprête un perso en jdr, qu'on soit joueur / jopueuse ou MJ, sa personnalité sera fonction bien plus de sa culture d'origine, de son vécu, de son origine sociale, que de son sexe / genre. Même si celui-ci a pu avoir une influence dans le vécu.
- Sammy
Le fait d'incarner une femme lorsqu'on est un homme ou l'inverse n'est en rien différent de la mécanique d'interprétation qui permet à un joueur d'incarner un extra-terrestre ou une race fantastique quelconque.
La chose importante est toujours la même : que le joueur soit à l'aise dans le rôle qu'il est censé incarner.
Les questions de genre et de sexualité me font un peu sourire, étant un heureux meneur de l'excellent JDR Eclipse Phase. En effet dans cet univers transhumaniste à l'extrême on change de corps (donc potentiellement de sexe) comme on change de voiture aujourd'hui et concernant les notions de sexualité.... comment dire .... absolument tout est envisageable
Oui, mais non. Çà dépend énormément de l'univers de jeu aussi. Si tu joues dans un truc à la Servante Écarlate, le sexe est un déterminant clef. Dans un univers heroic fantasy classique, souvent très peu d'importance: dur dur de différencier un nain d'une naine dans de nombreux univers !
En revanche, à mon avis, le sexe du MJ/joueur n'a aucune importance par rapport au perso.
Oui, mais non. Çà dépend énormément de l'univers de jeu aussi. Si tu joues dans un truc à la Servante Écarlate, le sexe est un déterminant clef. Dans un univers heroic fantasy classique, souvent très peu d'importance: dur dur de différencier un nain d'une naine dans de nombreux univers !
Pour l'interprétation en soi ? Non. Pour la position sociale ? oui. Mais cette position sociale elle fait aussi partie de l'histoire du personnage. Que ces contraintes soient dues à son genre ne veut pas dire que que ltravail d'interprétation soit fondamentalement différent. On prend l'histoire, le vécu, et on l'interprête. Donc le genre en soi n'a pas d'importance dans l'interprétation, même si l'oppression subie par le personnage est issue de son genre.
Quelle blague. Y a vraiment de gros problèmes de sexualité chez les rolistes, c'est aberrant... Ça me fait penser à ce MJ en convention qui refusait qu'une nana joue un homme et l'a pourrie tout du long (parce que tu comprends, elle est pas capable de cerner le caractère masculin).
Je crois que j'ai joué autant d'hommes que de femmes dans ma vie de PJ. Si ça ne vous est jamais arrivé d'incarner un membre du sexe opposé, essayez ; et si c'est une caricature, on s'en fout c'est pas la première et c'est pas la dernière caricature que vous incarnez...
- Panda Monk
Oui je trouve assez sur-réaliste le débat. Qu'on soit homme ou femme pour jouer un personnage féminin ou masculin, aucune importance, c'est même assez sympa de tester et jouer autre chose. Je ne vois pas le souci et pour le coup j'ai trouvé très juste les interprétations de Julien dans RnP et cela ne m'a même pas fait ciller encore moins me poser une seule question à ce sujet. Sincèrement. Pour moi le sujet n'est pas qui incarne qui. Le sujet est d'incarner juste. Donc si on joue une femme en 1420, de ne pas le faire avec un esprit libertaire, autonome, conflictuel, athé etc... et des réflexes plutôt liés aux années 2000. Pour le reste, c'est assez surprenant effectivement de constater que dans un milieu comme le JdR où l'on a justement souffert d'ostracisme, de clichés, de contre vérités, de mauvaises opinions toutes faites et préconçues, on ne soit pas plus ouverts sur ces questions. Concrêtement autour d'une table, tout s'efface pour se concentrer sur la résolutions des situations et l'imaginaire... Espérons que nous n'emporterons pas avec nous dans le jeu les idées les plus sombres qui hantent encore nos sociétés. Pour moi le JdR c'est aussi une grande liberté. Alors profitons-en. Ce n'est pas le lieu de projeter quelque fausse vérité que ce soit.
Ce qui n'empêche pas ma femme de me traiter d'affreux macho régulièrement...
- Sammy
- et
- alanthyr
Ne dramatisons pas non plus: en plus de 20 ans de pratique de JdR je n'ai jamais rencontré un souci sur cette question. Avec régulièrement des hommes qui jouent des femmes et vice versa. Et je suppose que nous ne sommes pas les seuls.
Je pense qu'il y en a qui se font des noeuds au cerveau pour rien. C'est un faux débat. J'ai joué des femmes en nombre parce que j'avais trouvé une jolie illustration. Et j'ai des potes qui ont fait de même. On ne s'est jamais posé la question de savoir si on était dans le cliché ou pas. On avait une belle image, une psychologie, ainsi les autres arrivaient à visualiser notre personnage ... voilà rien de plus.
Le reste c'est juste de la littérature.
On est des rôlistes, pas des acteurs, ni militants.
Encore une fois.
"Débat surréaliste", "ne dramarisons pas", "faux débat", "noeuds dans le cerveau" ... Eh, les gars ! Edwin et moi avons juste parlé d'une difficulté personnelle que nous avions à imiter les voix féminines de facon crédible, et des solutions que nous utilisions pour y remédier. On n'a jamais prétendu qu'il fallait interdire à qui que ce soit de faire autrement...
Alors ce serait sympa de ne pas faire de nos propos un débat dramatiquement surréaliste, justement...
- alanthyr
oui ben à moins d'être un imitateur, la voix tu ne l'auras jamais. Au mieux, tu auras une intonation.
La seule chose que tu peux faire, c'est appuyer ton propos par une description quant aux attitudes de ton personnage féminin. N'essayes pas d'imiter une femme, dis simplement ses faits et gestes. Et puis cela coulera de source ...
- Utilisateur anonyme
- et
- Gollum
Tout à fait. Faire passer l'intention et non la voix... Autrement dit, jouer les motivations du personnage, peu importe son genre... C'est la solution que nous a brillamment donnée Julien Dutel et que je vais m'empresser d'appliquer !
Je ne sais pas si elle conviendra aussi à Edwin mais elle me va parfaitement... Ca va me permettre de faire encore plus de choses à la première personne.
Avez-vous vu cette vidéo et ce débat ?
Vidéo sur Youtube (en anglais)
Cela montre un des biais possible de commencer le Jdr en regardant un Actual Play.
C'était juste pour alimenter ce fil...